Les autorités chinoises ont toujours cherché à attiser le patriotisme de la population à coups de slogans et d'images de propagande. Cette tendance s'est accrue ces dernières années, des placards sur les murs et des émissions de télévision vantant constamment la grandeur de la Chine illustrée par son bon économique spectaculaire au cours des trois dernières décennies et la place prépondérante qu'elle a pris dans le monde. L'anniversaire des 70 ans de gouvernement communiste est l'occasion idéale pour y donner encore un coup d'accélérateur en cette période de guerre commerciale avec les Etats-Unis. Les villes sont placardées de rouge et les nouvelles à la télévision font état de récoltes florissantes, de villages riants, de paysans riches, et d'ouvriers prospères... Tout va bien dans le meilleur des mondes... Mais cette propagande est tellement intégrée au "paysage" et dans les esprits que personne n'y prête attention.
Le poète Marc Fontana, exprime cette forme de coercition qu'est le "patriotisme imposé" dans un très beau poème que lui a inspiré son expérience de la Chine.
Aimer le pays
Les huit caractères sont si gros qu'on passe sans les voir
Les douze coups de midi sonnent à la gare de Pékin sans éveiller ceux qui ne sont ni d'ici ni d'ailleurs
Devant la porte des gargotes, de petits mégaphones croassent pour allécher les porteurs de balluchons,
Celles, visages et mains rougies, qui désherbent dans le parc, accroupies, assises à même la terre,
Ceux qui rejoignent le soir leur baraque de chantier, quelques œufs et des petits pains dans un sac de plastique transparent
Faut-il marcher, marcher pour aimer le pays, partir user ses forces
Faut-il pour innover tant donner, porter, creuser, tirer, soulever
Faut-il à ce point tolérer, supporter avec la plus grande vertu ?
Il le faut, c'est écrit en quatre mots et huit caractères, mais si gros qu'on passe sans le croire
in "Traversée du parc Ritan"
Marc Fontana
édition au Pont 9, 2018
ISBN : 9791096310227